Les députés de la région s’expriment : Faire de la politique en temps de pandémie

par Steve Martin
Les députés de la région s’expriment : Faire de la politique en temps de pandémie
Les députés Denis Trudel, Xavier Barsalou-Duval et Nathalie Roy (Photo : courtoisie)

Depuis le début de la période d’isolement, les décisions de nos politiciens sont au cœur de nos conversations. Nous avons discuté avec trois élus de la région afin de savoir comment l’arrivée de la COVID-19 a transformé leur routine de travail au quotidien.

« J’ai recommencé à me déplacer »

Denis Trudel, député fédéral de LongueuilSaint-Hubert

 

« Ce qui a changé concrètement, c’est qu’on ne voit plus personne, révèle le député du Bloc Québécois. Les gens nous écrivent, mais il n’y a plus de contact humain. J’ai recommencé à me déplacer il y a quelques jours, mais je me rends compte que, pour l’instant, je suis un des seuls. Je porte le masque, la visière et des gants. Je vais voir les organismes communautaires, les banques alimentaires pour leur donner un coup de main. J’en profite pour remercier les bénévoles. »

Un changement radical pour celui qui avait pris l’habitude de visiter les groupes environnementalistes, sociétés d’histoire et Fadoq de sa circonscription. En revanche, le comédien de carrière utilise aujourd’hui ses talents artistiques afin de divertir certains citoyens qui ont bien besoin d’être déridés.

« Cette semaine, j’ai organisé des animations devant une résidence pour personnes âgées, ici, à la Seigneurie du Tremblay et devant un HLM. Je sors avec un groupe de musiciens. On respecte toutes les consignes. Les gens sont heureux de nous accueillir. »

Le drame de l’isolement

Le porte-parole de son parti en matière de solidarité sociale admet par ailleurs avoir surtout reçu des demandes provenant de particuliers qui se sont retrouvés dans une situation précarisée depuis le début de la pandémie.

« Surtout des gens qui étaient des laissés-pour-compte des programmes et ce, pour toutes sortes de raison. Leur assurance-emploi se terminait par exemple et ils ne savaient pas s’ils allaient avoir droit à la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Certains sont tombés entre les craques du système, d’autres qui ne comprennent pas les formulaires. Quand ils appellent Revenu Canada, c’est compliqué, alors on essaie de les aider, de les diriger aux bons endroits. Ç’a occupé la grande partie de nos journées au début de la crise et c’est encore le cas aujourd’hui.»

Le député admet avoir une empathie particulière pour ceux qui, avec la crise, se sont retrouvés dans une situation d’isolement difficile à supporter.

« J’ai envoyé une lettre aux aînés pour leur rappeler de respecter les consignes et leur dire que nous sommes là s’ils ont besoin de nous. Moi, je suis chanceux. J’ai ma femme, mes enfants. Le soir, quand je rentre à la maison, nous passons la soirée en famille, nous parlons de notre journée. Mais il y a des milliers de gens au Québec et des millions à travers le monde en ce moment qui sont isolés. Et ça, c’est un drame. »

 

La nature des appels a changé »

Xavier Barsalou-Duval, député fédéral de Pierre-Boucher–Les Patriotes–Verchères

 

« Nous avons reçu beaucoup d’appels depuis le début de la pandémie, mais leur nature a changé, explique le député du Bloc Québécois. Les choses évoluent au fil du temps. Durant les premières journées, nous avions surtout des questions, des suggestions et des réactions par rapport à la situation générale. On a pris des notes et ça a inspiré nos actions. Aujourd’hui, nous recevons surtout des questions très concrètes concernant la vie quotidienne et les besoins urgents. »

Afin de répondre aux nombreuses demandes, le politicien a par ailleurs instauré avec les membres de son équipe un système d’alternance afin d’assurer une présence en continuité dans le bureau de circonscription.

« Au début de la crise, ç’a été un chambardement pour toute l’équipe. Il fallait donner des explications aux citoyens sur ce qu’ils venaient d’entendre à la télé alors que nous-mêmes, nous n’avions pas encore tous les détails. Nous avons reçu beaucoup d’appels concernant l’assurance-emploi. Des appels d’entreprises également qui avaient toutes sortes de question sur le fonctionnement des programmes. Il fallait se tenir au fait et ce, à tous les jours. Présentement, c’est moins pire. Nous avons peut-être des annonces une fois semaine, mais au départ, c’était quotidien. »

Quand les vacances tournent au vinaigre

Selon M. Barsalou-Duval, la disponibilité en continu a contribué parallèlement à la gestion de certaines situations délicates, dont le rapatriement de citoyens coincés à l’étranger.

« Nous avons dû adapter notre fonctionnement. Il y avait des gens en détresse, alors ce sont des situations qui exigeaient une action immédiate. Ça a demandé beaucoup d’énergie. Ça n’a pas été évident au départ car il n’y avait pas de modèle à suivre pour pouvoir les aider.  Ç’a été compliqué pour ces personnes qui, parfois, ne pouvaient pas sortir de leur chambre d’hôtel. D’autres, à l’inverse et pour toutes sortes de raisons, se faisaient mettre dehors des établissements où ils logeaient. Les circonstances étaient très différentes d’un cas à un autre. »

Selon le député, des citoyens ont même pu recevoir un traitement hostile à certains endroits où leur présence n’était visiblement pas désirée.

« Pourtant, à l’origine, ces gens ont quitté le pays en pensant partir en vacances. Disons que ç’a créé des situations stressantes pour eux et pour leurs proches. »

 

« J’espère que nous allons en sortir grandis »

Nathalie Roy, députée provinciale de Montarville

 

Comme ses collègues, la député et ministre de la culture et des communications a dû faire face à une augmentation marquée du volume d’appels et des demandes des citoyens à son bureau de circonscription et ce, dès le début de la crise. Des demandes auxquelles ses principaux assistants, la directrice de bureau de circonscription Sylvie Trépanier, son attachée de presse Vanessa Guimond et l’attaché politique Jean-François Dupuis, se sont évertués à répondre. « Ce sont des gens de cœur, nous dira-t-elle à propos de ceux qui font partie de sa garde rapprochée. On travaille uniquement par téléphone et par courriel. Je peux avoir trois ou quatre réunions ministérielles par jour qui peuvent durer de deux à trois heures chacune. Entre celles-ci, j’appelle Sylvie, Jean-François et Vanessa et on se divise les tâches. Ma priorité, ça demeure les citoyens de Montarville. »

Au-delà des questions et des inquiétudes manifestées par les résidents de la circonscription, madame Roy se dit impressionnée par le nombre de propositions faites par des citoyens désirant aider.

« Je pense par exemple, l’équipe de Carquest, un commerçant de pièces d’automobiles de Boucherville, raconte-t-elle. Comme ils font de la peinture de carrosserie, ils avaient 800 masques N-95 à leur disposition. Ils ont décidé de m’appeler pour les offrir, alors nous avons coordonné le tout pour qu’ils puissent être remis à l’hôpital Pierre-Boucher. Des actes comme celui-là, nous en voyons tous les jours. »

Mois de décorum, plus de proximité?

Côté pratique, la pandémie a également exigé son lot de concessions et d’adaptations.

« Je dois vous avouer que je porte le mou alors que je vous parle, s’amuse la ministre. J’ai les cheveux très longs et je me les coupe moi-même! C’est assez particulier d’avoir son bureau dans sa cuisine et de passer des heures assis devant Zoom ou Teams. J’avais une réunion avec des intervenants du milieu de la culture plus tôt aujourd’hui et j’avais l’impression de les accueillir chez moi. C’est paradoxal, mais ce travail en solitaire, ça crée un genre de rapprochement. C’est très étrange. »

La politicienne espère par ailleurs qu’à la sortie de la crise, malgré tout, certaines choses auront changé en mieux.

« J’espère que nous allons en sortir grandis et que nous allons avoir appris à faire les choses autrement. Je pense que plusieurs personnes vont aimer l’idée du télétravail quand ce sera possible et faisable, ce qui implique qu’il y a moins de véhicules sur les routes, moins de temps de déplacement et donc, moins de pollution. Je crois qu’il y a aussi de bonnes choses qui vont émerger de tout ça. »

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