Des cerfs qui broutent tranquillement en bordure des rues, des opossums qui s’installent discrètement depuis quelques années, et maintenant… des dindons sauvages qui se promènent en plein quartier résidentiel. La faune urbaine de Boucherville est en pleine transformation.
On voit en effet de plus en plus d’animaux sauvages en ville. Pendant que certaines bêtes gagnent du terrain, d’autres semblent disparaître : les moineaux se font beaucoup plus rares et les hirondelles, si nombreuses autrefois, ont presque disparu du paysage bouchervillois. En revanche, il n’est maintenant pas rare que l’on observe dans nos cours des geais bleus et des cardinaux.
Que se passe-t-il dans nos milieux de vie ? Le biologiste Richard Beauchemin explique les raisons derrière ces changements.
Un climat plus doux
Le principal facteur se trouve du côté des changements climatiques. «Nos hivers sont moins froids, il y a moins de neige et les périodes de gel intense sont moins fréquentes», note M. Beauchemin. Résultat : les animaux qui, hier, ne survivaient pas à nos hivers québécois peuvent maintenant s’y établir et s’y reproduire. C’est le cas notamment de l’opossum d’Amérique, autrefois rare à cause du froid, mais qui est aujourd’hui en pleine expansion vers le nord.
Un environnement très nourrissant
À Boucherville, l’abondance de nourriture est un autre facteur clé. Les terres agricoles et les boisés situés entre Boucherville et Varennes offrent un habitat idéal pour les cerfs, les dindons, les bernaches et autres espèces granivores. «Il y a beaucoup de culture du soya, du blé d’Inde et du canola, et les mangeoires sont remplies par les citoyens : tout cela constitue une source constante de nourriture. Les dindons sauvages, par exemple, profitent de cette abondance et vivent souvent en bordure des fermes et des boisés», signale M. Beauchemin.
Faible prédation
«Ces animaux ont peu ou pas de prédateurs, ce qui explique aussi leur prolifération. Les renards s’attaquent aux œufs ou aux jeunes dindons, mais pas aux adultes, plus agressifs. Les coyotes, quant à eux, sont peu nombreux à Boucherville. Il n’en pleut pas ici», résume le biologiste avec humour.
Des risques à surveiller
Même si ces animaux sont souvent inoffensifs, certaines espèces présentent des risques. Les opossums, par exemple, peuvent mordre et être porteurs de maladies. Quant au fait qu’ils mangeraient les tiques, cela n’est qu’une légende urbaine, selon le spécialiste.
La présence des ratons laveurs est étroitement surveillée en raison de cas de rage recensés en Estrie. «Il ne faut pas nourrir les animaux sauvages», rappelle le biologiste.
Des oiseaux qui s’adaptent, d’autres qui déclinent
On observe aussi des changements chez les oiseaux. Les cardinaux et les geais bleus, autrefois rares, sont aujourd’hui très présents, attirés par les mangeoires. À l’inverse, les hirondelles sont en déclin. C’est principalement dû à l’utilisation des pesticides dans les terres en culture et qui tuent les insectes dont elles se nourrissent, ainsi qu’aux collisions avec les fenêtres des gratte-ciels modernes lors de la migration de ces petits oiseaux, sans oublier la présence des chats qui sont de grands prédateurs.
La faune urbaine dans 10 ou 20 ans
Selon le biologiste, la faune urbaine continuera de s’intensifier. Ratons laveurs, mouffettes, renards, écureuils, marmottes et lapins à queue blanche profiteront d’un environnement riche en nourriture et peu contrôlé par la chasse ou le piégeage.
Le réchauffement climatique favorisera aussi la présence accrue de dindons sauvages et des cerfs de Virginie, ce qui pourrait attirer davantage de prédateurs comme les coyotes.
En l’absence d’activité de chasse et de piégeage, les maladies pourraient devenir l’un des facteurs régulant les populations animales dans les banlieues.