Christiane-Marie Edom: Quand la recherche d’identité devient la quête d’une vie

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Par Steve Martin, Initiative de journalisme local
Christiane-Marie Edom: Quand la recherche d’identité devient la quête d’une vie
La Verchèroise Christiane-Marie Edom (Photo : Essor-Livres)

Comme un casse-tête ou une courtepointe, notre identité se construit à partir de nos origines et de notre communauté d’appartenance, de nos convictions et de nos choix. Mais pour certains, cette quête s’apparente plutôt à un grand voyage qui, comme ce fut le cas pour la Verchèroise Christiane-Marie Edom, peut vous mener d’un continent à un autre.

L’histoire d’une vie racontée dans les pages du bouquin Le dessin Maori, publié par les éditions Essor-Livres, ne peut se résumer en quelques lignes. Née en Guadeloupe d’un père militaire et d’une mère sage-femme, mais possédant la nationalité française, la Verchèroise aux 82 printemps a, la plupart du temps  depuis son enfance, dû s’intégrer à des milieux au sein desquels le sentiment d’appartenance n’allait pas de soi.

Ce fut notamment le cas au Soudan français (aujourd’hui le Mali), au Sénégal où elle a étudié à l’université ou encore au Maroc. Son père ayant été affecté à Marrakech, la jeune Christiane devait côtoyer les familles blanches alors qu’elles et ses proches étaient les seuls noirs du camp.

« Ce sont des anecdotes qui concernent certaines périodes de ma vie, explique Mme Edom de sa voix apaisante. Je décris comment j’ai vécu au Sahel. C’est une Afrique qu’on ne retrouve plus de nos jours. Vous savez, cette région a subi une sécheresse de trois années sans une goutte de pluie. Quand nous y étions au début des années 50, c’était giboyeux. Il y avait des fauves, et s’il y a des fauves c’est parce qu’ils avaient de quoi se nourrir : des gazelles des antilopes, des phacochères… C’était le paradis terrestre, mais tout ça a disparu. »

Cheveux crépus et couleurs voyantes

Au-delà de ces anecdotes, le fil conducteur du récit de Christiane-Marie Edom demeure cette quête d’identité qui l’a poursuivie jusqu’au Québec, sa patrie d’adoption depuis 55 ans. D’ailleurs, dans son plan initial, l’autrice espérait faire de La recherche de mes racines nègres le sous-titre de son ouvrage, mais les temps étant ce qu’ils sont, l’idée a été mise de côté avant la publication.

« À mon arrivée, j’ai fait connaissance avec des Québécois et c’était fantastique, se souvient-elle. Mais plus souvent, on fréquentait le milieu haïtien. C’est une culture que les noirs en Afrique trouvent glorieuse, car ils ont acquis leur indépendance, mais moi, à l’époque, on m’a fait comprendre que j’étais « colonisée ». Pour reprendre l’expression exacte : « Peau noire et masque blanc ».

Avant d’écrire, Christiane Edom a, après avoir pris sa retraite de l’école secondaire De Mortagne où elle travaillait, réalisé un grand rêve en suivant des cours aux Beaux-arts. C’est elle d’ailleurs qui a peint l’image qui illustre son livre, une démarche qui, avant d’entreprendre son récit, lui a permis d’explorer le sujet au cœur de ses questionnements.

« J’ai fait des lectures aussi. Ça m’a permis de prendre conscience de certaines choses. Par exemple, les attributs des noirs ont fait l’objet de thèses de doctorat. J’ai découvert toute cette pression qu’on exerce sur les femmes noires. Par exemple, de garder nos cheveux crépus, c’était impensable à une certaine époque. Il fallait se faire défriser sinon, ça venait avec une forme d’aliénation. Il fallait éviter de porter des couleurs voyantes. Ce sont des questions que j’ai étudiées et qui m’ont beaucoup troublée. Alors en cherchant mes racines, j’ai aussi cherché ce que je devais accepter de moi. Et j’ai fini par trouver la paix à travers tout ça. J’ai fait des choix. »

Une macédoine de cultures

Aujourd’hui, Christiane-Marie Edom, qui a accumulé assez de notes pour écrire de nombreux bouquins, espère avoir laissé quelques pistes de réponses pour ses enfants nés au Sénégal ou au Québec. Ses petits-enfants également et même un arrière-petit-enfant.

En couple depuis 40 ans avec un « Québécois pure laine », comme elle décrit en riant, sa famille est aujourd’hui une macédoine de cultures à travers les alliances nouées par ses filles et ses garçons. L’arbre généalogique s’est donc enrichi de branches portugaises et arméniennes, haïtiennes, camerounaises, italiennes et marocaines. « J’ai aussi un enfant qui vit en Angleterre, un autre qui vit en Belgique, alors voyez le style! »

Comme quoi, au gré des voyages et des expériences qui enrichissent la vie, les barrières qui séparent les cultures finissent par tomber, peu importe votre langue, vos croyances ou la couleur de votre peau.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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