Monter sur la scène du Métropolis avec une forte odeur d’essence dans l’air…

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Par Daniel Bastin
Monter sur la scène du Métropolis avec une forte odeur d’essence dans l’air…
Informationpolitique.com

Un mort et huit millions de blessés…

Âgé de 47 ans, Stéphane Bergeron a passé près de la moitié de sa vie comme homme public puisqu’il est député depuis près de 20 ans et c’est pour cette raison qu’il est en mesure de gérer ses émotions, quelle que soit la situation qui se présente. Mais en évoquant les événements survenus au Métropolis le soir du 4 septembre, la voix de M. Bergeron change et certaines pauses lors de ses réponses démontrent que cette tragédie l’a profondément marqué…

La soirée avait pourtant commencé de belle façon pour le député nouvellement réélu et son équipe. « Nous roulions, plein d’allégresse, en direction de Montréal, content de notre victoire dans la circonscription. À l’échelle nationale, il y avait des luttes serrées. À un moment donné, il y avait même 61 candidats du Parti québécois en avance, donc près d’une majorité. Il régnait donc une belle ambiance dans la salle quand nous sommes arrivés et cela me rappelait celle qui régnait en 1981 quand le PQ avait été réélu… »

« À un moment donné, on nous a demandé de nous tenir prêt à aller sur scène avec Mme Marois et, à ce moment, j’ai pris conscience qu’il y avait danger. Il régnait une odeur d’essence très forte. Aussi forte que quand on fait le plein. La source devait être très proche et on se trouvait dans une zone peut-être inflammable. J’avoue qu’à ce moment, j’étais un peu inquiet. »

« Par la suite, les gardes du corps de Mme Marois l’ont presque soulevé de terre pour l’amener en sécurité. Je voyais bien qu’il se passait quelque chose de grave. Comme la foule, j’étais carrément médusé, mais il n’y avait pas de mouvement de panique, heureusement. On savait qu’il y avait une menace pour la sécurité de Mme Marois et on se demandait aussi s’il y en avait une pour nous. Je devais rationnaliser mes pensées parce que je ne savais pas s’il fallait se mettre en mouvement afin de sortir ou rester à l’intérieur… »

À 10 mètres de la porte…

« Mme Marois est revenue sur scène pour dire à la foule de quitter dans le calme et d’éviter un mouvement de panique. Mon groupe et moi nous nous sommes retrouvés à la table d’un café tout près du Métropolis pour rassembler nos esprits et c’est la que nous avons mieux compris ce qui se passait en regardant le Réseau de l’information (RDI). Nous avons pris conscience de l’ampleur de l’attaque, qu’un technicien avait été tué et un autre blessé. Il y avait un incendie à une des portes du Métropolis, cette même porte que j’avais prise pour entrer. »

« Je me trouvais à 10 mètres seulement de cette porte où l’homme a tenté d’entrer. Selon les interprétations que j’en ai, les deux techniciens ont tenté de fermer la porte et il a alors tiré à travers elle. Il a ensuite incendié cette porte afin de s’assurer que la foule ne puisse pas sortir par là et il s’est dirigé vers l’avant du Métropolis… Il a été intercepté à ce moment par les policiers. »

Stéphane Bergeron fait une pause, s’éclaircit la gorge avant de poursuivre : « Si son arme ne s’était pas enrayée, Dieu sait ce qui serait arrivé… J’ai une pensée émue pour ces deux personnes (NDLR : la victime, Denis Blanchette, et son collègue, Dave Courage, blessé). Nous leur devons une fière chandelle… », de dire le député, visiblement ébranlé.

Huit millions de blessés

« Un journaliste de RDI a bien résumé la situation : l’attentat au Métropolis a fait une victime et huit millions de blessés. Il n’y a pas une Québécoise et un Québécois qui ne s’est pas levé le lendemain sans ressentir un profond malaise. »

Nous lui avons alors demandé s’il a senti que cette attaque visait le Parti québécois ou Pauline Marois. « Je n’ai pas vu cela comme ça. Ce n’est pas à mes yeux une attaque contre une personne mais bien contre notre système démocratique. Nous sommes en démocratie et nous réglons nos problèmes en discutant, pas par la violence. Ce n’est pas pour rien que l’institution s’appelle un parlement; on y parle, on échange, on ne se tape pas dessus. On ne prône jamais la violence pour faire avancer des idées. On fait valoir son point de vue en présentant des arguments, pas en présentant un AK-47… »

 

 

 

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