Le projet privé de complexe multisports soulève de nombreuses questions

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Par Daniel Hart
Le projet privé de complexe multisports soulève de nombreuses questions

Lors de la soirée d’information publique tenue à l’école De Mortagne

La soirée d’information tenue la semaine dernière à l’école De Mortagne sur la construction d’un projet de complexe multisports intérieur à Boucherville a permis aux citoyens de se faire une idée générale de cette initiative du secteur privé et de soulever bon nombre de questions pertinentes.

Un groupe d’investisseurs nommé Palais des sports de la Montérégie propose d’ériger un bâtiment d’une superficie de 130 000 pieds carrés sur un terrain appartenant à la Ville, tout près du Centre multifonctionnel Francine-Gadbois. Cet immeuble de quatre étages servirait à la pratique du soccer, du baseball, du football et du rugby. Le terrain de soccer, divisible en trois, répondra aux normes de la FIFA. À ces espaces s’ajouteraient trois gymnases, une palestre pour la gymnastique aux appareils, six terrains de pétanque intérieurs, des salles pour le conditionnement physique, l’aérobie et le taï-chi de même que trois parois d’escalade. De nombreuses activités sportives y ont été projetées, y compris la pratique de golf. L’objectif consiste à satisfaire les besoins en infrastructures sportives de plusieurs groupes d’âge, y compris les aînés.

L’assistance a eu l’occasion de voir des esquisses préparées par une firme d’architectes afin de donner un aperçu de ce à quoi ressemblerait le concept présenté. L’aspect extérieur propose un fini architectural moderne en maçonnerie, bois et aluminium. Des parois végétales ornent le haut du bâtiment. Celui-ci serait intégré en partie dans l’une des pyramides du parc Vincent-d’Indy. À l’intérieur, des estrades pouvant accueillir 200 spectateurs seraient installées sur la surface de soccer. Certains espaces ailleurs auraient des parois vitrées. Autour de l’édifice, les utilisateurs disposeront de 189 cases de stationnement.

Faisant un rappel historique de ce dossier, le maire Jean Martel a relaté les démarches qui ont conduit à cette proposition. Durant la campagne électorale municipale de 2009, le club de soccer local avait manifesté un intérêt pour qu’il y ait un endroit dédié à la pratique du soccer intérieur dans la municipalité. En 2010, un projet a été analysé avec un groupe de citoyens, mais n’a cependant pas abouti. Durant la même année, la Ville a tenté de trouver des investisseurs sans succès.

À l’automne 2011, l’ancien directeur de l’école secondaire De Mortagne, Serge Louka, a laissé savoir au maire Jean Martel qu’un promoteur de la région souhaiterait proposer de construire un soccer intérieur, en l’occurrence Palais des Sports de la Montérégie. Une première rencontre s’est tenue au mois de novembre entre les parties.

En raison du développement de son programme sport-études, l’école secondaire recherche de nouveaux plateaux sportifs. L’an prochain, quelque 710 athlètes seront inscrits à ce programme spécialisé. Plusieurs élèves ont choisi le soccer comme discipline. Ils s’entraînent au Collège Français, ce qui nécessite beaucoup de temps de transport. Les élèves en baseball doivent aussi se rendre à Sainte-Julie et à Saint-Bruno. D’autres jeunes en ringuette se rendent à Brossard pour leur entraînement. « Nous pourrions accueillir entre 900 et 1000 élèves au programme sport-études, mais il manque de gymnases à l’école. L’année prochaine, nous souhaitons aussi ouvrir deux autres disciplines, la lutte olympique et le cheerleading », a fait valoir la directrice actuelle de l’école, Violaine Fortin.

Les discussions entre le promoteur et l’administration municipale ont conduit à une entente de principe qui a été entérinée en janvier dernier. Cette étape visait à confirmer aux bailleurs de fonds le sérieux de la démarche. Palais des sports de la Montérégie s’était déjà inscrit auprès du commissariat au lobbying auparavant. En gros, le promoteur investirait la somme de 27 millions de dollars dans la construction d’un complexe multisports. La Ville fournirait le terrain sur lequel ce centre prendrait place sous la forme d’un bail emphytéotique d’une durée de 35 ans. À la fin du terme, la Ville deviendrait propriétaire de l’immeuble. Durant ces 35 années, le promoteur aurait la responsabilité de la gestion et de l’entretien du bâtiment. La municipalité s’engagerait également à réserver les espaces de location à la hauteur de 28 % à un tarif préférentiel. Il s’agirait d’une somme annuelle d’environ 750 000 $, selon le maire. La Ville loue déjà certains espaces ailleurs; ce budget serait orienté autrement, vers de nouveaux services.

Le promoteur estime à 500 000 $ les taxes qu’il versera chaque année à la municipalité, pour une évaluation totale de 17,5 millions au terme du bail. Il avance également que le bâtiment qu’il cédera à la Ville aura une valeur de 50 millions de dollars.

Face à ce projet d’envergure, certains citoyens se sont montrés méfiants et ont soulevé des doutes. Comment les besoins ont-ils été établis pour en arriver à ce projet? Le président de Palais des sports de la Montérégie, Carol Brunet, a indiqué avoir rencontré les responsables des organismes sportifs locaux et que ceux-ci ont déterminé ce qu’ils recherchaient.

Les résidants du secteur avoisinant ont exprimé leurs inquiétudes quant à une éventuelle perte de tranquillité en raison de l’incidence de ce projet sur la circulation locale. Quelque 500 personnes fréquenteront ce centre au quotidien. Une étude de circulation de la firme spécialisée CIMA évalue à 123 le nombre de véhicules à l’heure qui circuleraient lors de l’entrée des activités et à 107 à la sortie. Toutefois, aucun représentant de CIMA n’était présent à la rencontre pour expliquer ces calculs.

L’assistance s’est interrogée sur ce que représentait la superficie du bâtiment versus celle du centre multifonctionnel. De fait, celui-ci a une surface de 27 000 pieds carrés, ce qui signifie que le complexe de soccer intérieur serait près de cinq fois plus spacieux. Toutefois, un second scénario pour un immeuble plus petit, de 85 000 pieds carrés, est aussi sur la planche à dessin.

D’autres ont soulevé la question de la rentabilité. Les promoteurs prévoient louer leurs locaux à l’école De Mortagne à la hauteur de 6 % la première année et de 12 % à moyen terme. Ils comptent aussi obtenir des revenus par la location du terrain de soccer et des gymnases à d’autres organismes que la Ville, le prêt de salles, l’organisation de camps sportifs de jour durant les périodes de vacances, la mise en place de programmes sportifs spéciaux et les commandites publicitaires. Au total, les revenus devraient s’élever à quatre millions de dollars par année, selon leurs prévisions budgétaires.

Certains ont voulu s’assurer de la solidité financière des investisseurs afin que la Ville ne se retrouve pas éventuellement avec un éléphant blanc. Le président de Palais des sports de la Montérégie a précisé que ce projet était financé à la hauteur de 92 % par trois compagnies d’assurance-vie et un fonds institutionnel qui ont accepté d’effectuer un prêt à taux fixe de 5 % pour une période de 25 ans. L’autre 8 % restant relève d’un partenaire silencieux et du Fonds de solidarité de la FTQ.

Le promoteur vise une ouverture du projet à l’automne 2013, mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres. Un groupe de citoyens du secteur immédiat souhaiteraient voir cette construction ailleurs qu’à proximité de leur propriété.

Des représentants des organismes sportifs comme le club de soccer et les gymnastes les Réflexes ont invité les citoyens récalcitrants à penser aux jeunes concernés par ces installations et aux générations futures. À la proposition d’une personne dans l’assistance, le maire Jean Martel a laissé une porte ouverte à la possibilité de tenir un référendum ou de commander un sondage sur ce projet encore embryonnaire qui risque de faire couler beaucoup d’encre. Cette rencontre d’information qui s’est échelonnée sur 3 h, dont 1 h 30 a été réservée à une période de questions, a attiré environ 150 personnes.

 

 

 

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