La première carpe de roseau au Québec a été capturée à Contrecœur

Photo de Daniel Bastin
Par Daniel Bastin
La première carpe de roseau au Québec a été capturée à Contrecœur
Le 28 février dernier, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec (MFFP) a confirmé la présence dans le fleuve Saint-Laurent de la carpe de roseau, l'une des quatre espèces de carpes asiatiques qui sont extrêmement envahissantes. (Photo : MFFP)

Le 28 février dernier, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec (MFFP) a confirmé la présence dans le fleuve Saint-Laurent de la carpe de roseau, l’une des quatre espèces de carpes asiatiques qui sont extrêmement envahissantes. Cette conclusion fait suite aux analyses d’ADN environnemental menées conjointement avec le laboratoire de génétique du Dr Louis Bernatchez de l’Université Laval. Cette annonce préoccupe particulièrement le ministère puisque les carpes asiatiques provoquent des impacts majeurs sur les milieux qu’elles colonisent.
Dans le cadre de l’étude réalisée entre 2015 et 2017 par le Dr Bernatchez, « l’ADN de carpe de roseau a été détecté dans 16 des 110 sites analysés pour cette espèce. Ces échantillons positifs sont répartis dans le fleuve Saint-Laurent depuis le lac Saint-François jusqu’à l’archipel du lac Saint-Pierre, ainsi que le secteur aval des rivières Richelieu et Saint-François. Aucune trace de carpe argentée et de carpe à grosse tête n’a été détectée parmi les échantillons analysés pour ces espèces », peut-on lire dans le document.
Le ministère se dit très préoccupé par leur présence dans les eaux québécoises. À titre d’exemple, sa propagation dans les Grands Lacs pourrait avoir des impacts économiques de plusieurs milliards de dollars en raison de ses effets sur la pêche commerciale et la pêche sportive, notamment. Elle pourrait aussi entraîner des problèmes sanitaires. Des impacts semblables à ceux évalués pour la région des Grands Lacs sont attendus au Québec.
À Contrecœur
Rappelons qu’une première carpe de roseau a été capturée le 27 mai 2016 à la hauteur de Contrecœur par un pêcheur commercial. Sa taille et son poids records de 1,26 mètre et 29 kilos, ainsi que l’état de son système reproducteur, donnaient à croire qu’il s’agissait d’un spécimen âgé de plus de 15 ans et probablement stérile. Par contre, l’analyse approfondie des structures osseuses et des organes du spécimen a permis d’établir qu’il s’agissait plutôt d’une femelle fertile âgée d’environ neuf ans.
Lors de la conférence de presse, le MFFP a fait savoir qu’il continuera d’agir sur plusieurs fronts afin de limiter leur propagation, notamment en poursuivant l’implantation de saines pratiques de nettoyage des embarcations et de gestion de l’eau des viviers.
Une attention particulière sera également portée à la gestion des barrages et des passes migratoires afin de restreindre la propagation de carpes asiatiques du fleuve Saint-Laurent vers les eaux intérieures.
De plus, il a annoncé la mise en place de mesures limitant l’utilisation des poissons appâts au Québec. « Cette décision s’appuie sur le fait que le commerce de poissons appâts et leur utilisation pour la pêche sportive sont reconnus comme des vecteurs d’introduction et de propagation de pathogènes et d’espèces aquatiques envahissantes, dont les carpes asiatiques », a fait savoir le ministère.
« À compter du 1er avril 2017, il sera donc interdit d’utiliser des poissons appâts vivants en période hivernale partout au Québec. Par ailleurs, afin de réduire les risques de propagation d’espèces indésirables, le ministère rappelle que les modalités annoncées en 2012 concernant l’interdiction d’utiliser des poissons appâts morts en période estivale seront également effectives comme prévu à compter du 1er avril 2017. Ainsi, seule l’utilisation de poissons appâts morts pour la pêche hivernale demeurera permise, et ce, dans les zones de pêche où la pratique de cette activité était déjà autorisée. »

Que sont les carpes asiatiques?
Dans les années 1960, quatre espèces de carpes originaires d’Asie (argentée, à grosse tête, de roseau et noire) ont été importées aux États-Unis. Ces espèces, regroupées sous la dénomination de « carpes asiatiques », possèdent des caractéristiques exceptionnelles, notamment en ce qui a trait à la grande taille qu’elles peuvent atteindre, à leur vitesse de croissance et à leur taux de reproduction. Échappées de lieux d’aquaculture, les carpes asiatiques ont envahi le fleuve Mississippi et se sont dispersées naturellement dans son bassin versant.
Pourquoi les carpes asiatiques sont-elles préoccupantes?
Après quelques décennies de colonisation du bassin du Mississippi, les carpes asiatiques y représentent désormais jusqu’à 90 % de la biomasse par endroits et elles altèrent de façon importante l’habitat du poisson, entraînant une perte de biodiversité et l’effondrement de l’offre de pêche. Des moyens considérables ont été mis en place par les États-Unis et le gouvernement fédéral canadien pour tenter de contrer l’arrivée et l’implantation des carpes asiatiques dans les Grands Lacs. On estime que l’établissement des carpes asiatiques dans la seule région des Grands Lacs pourrait causer des pertes de plusieurs milliards de dollars en retombées économiques en raison des impacts négatifs qu’elles génèreraient sur les industries de la pêche sportive et de subsistance, les pêcheries commerciales, la navigation de plaisance et le tourisme, en plus de risquer de causer des problèmes sanitaires d’envergure. Des impacts semblables à ceux évalués pour la région des Grands Lacs sont attendus au Québec.
Où est rendu le front de colonisation des populations de carpes asiatiques dans l’Est de l’Amérique du Nord?
Le front de colonisation des carpes argentées et à grosse tête n’est qu’à quelques kilomètres des Grands Lacs, et ce, à plusieurs endroits, y compris près de l’entrée du canal de Chicago. D’ailleurs, trois spécimens de carpe à grosse tête ont été capturés dans le lac Érié, en 1995 et en 2000.
Depuis 1985, plus de 150 carpes de roseau ont été capturées dans les Grands Lacs. La majorité de ces carpes est issue d’introductions ou d’individus échappés d’étangs. Cependant, depuis 2011, la reproduction est confirmée dans la rivière Sandusky en Ohio, laquelle se jette dans le lac Érié.
La distribution de la carpe noire semble, pour le moment, cantonnée aux eaux du Mississippi.
Y a-t-il des carpes asiatiques au Québec?
La présence de la carpe de roseau dans le système du fleuve Saint-Laurent a été confirmée par le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs au début de 2017, sur la base de la capture d’un individu en mai 2016 et de la détection d’ADN propre à cette espèce dans des échantillons d’eau prélevés en 2015 et 2016. Aucune indication de la présence de carpes argentées, de carpes à grosse tête ou de carpes noires n’a été détectée jusqu’à présent.
(Mention de source : Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs)

Partager cet article